Bactéries
La riemerellose est une infection des palmipèdes et de la dinde, dûe à Riemerella anapestifer, anciennement dénommée Pfeifferella, Pasteurella ou Moraxella anapestifer. Décrite en 1932 et mise en évidence au début des années 70 en France, elle est devenue ces dernières années une dominante de la pathologie des palmipèdes, à l’origine de pertes économiques importantes.

Synonymie : pfeifferellose, moraxellose, sérosite du canard, syndrome riemerella ou septicémie riemerella.

L’agent de la maladie et son pouvoir pathogène


  • R. anapestifer est un bacille à Gram négatif, non sporulé, immobile et dépourvu de flagelle, de 0,3 à 0,5 µm de diamètre sur 1,0 à 2,5 µM de longueur. La bactérie nécessite un milieu de culture anaérobie.
  • L’agent est peu résistant dans le milieu extérieur. Il est sensible aux désinfectants usuels. En l’absence de désinfectant, R. anapestifer persiste 2 semaines dans l’eau et 4 dans la litière.
  • Il existe un virus R. anatipestifer-like, Coenonia anatina, qui diffère par ses caractéristiques biochimiques mais est identique au niveau clinique. Bacillus sphaericus a aussi été isolé dans des syndromes de type riemerellose. Actuellement, on recense au moins 21 sérotypes.
  • On constate de grandes variations du pouvoir pathogène selon la souche en jeu. Plusieurs sérovars sont souvent présents simultanément lors d’une infection.
  • Le germe pénètre dans l’organisme par voie pulmonaire ou par voie transcutanée, lors de lésions : plaies aux pattes, débecquage, insectes piqueurs, piquage, lésions des muqueuses. Le pouvoir pathogène semblerait plus limité lors que le germe pénètre par voie pulmonaire.

Les données épidémiologiques


La riemerellose concerne essentiellement les palmipèdes, notamment le canard mulard. De rares cas sont décrits chez la dinde, sporadiquement chez le poulet, le faisan et la caille.

Elle atteint classiquement les canards entre 1 et 8 semaines. L’incubation dure entre 2 et 5 jours. Les animaux de moins de 5 semaines meurent généralement 1 à 2 jours après l’apparition des signes cliniques. Les animaux plus âgés peuvent résister plus longtemps. Les cas sont rares chez les adultes.

Les sources de contamination sont les animaux infectés, malades ou porteurs sains, et les oiseaux sauvages, qui constitueraient un réservoir. Le portage de R. anatipestifer dans les voies respiratoires du canard semble extrêmement répandu, y compris sur des sujets parfaitement sains du point de vue clinique. Le statut bactériologique d’un lot de canetons ne peut donc expliquer à lui seul le déclenchement d’un épisode clinique et le rôle d’un cofacteur environnemental ou infectieux doit être envisagé.

La maladie survient souvent à la suite de facteurs déclenchants : troubles infectieux immunodépresseurs, conditions sanitaires d’élevage dégradées (parcours détrempés, atmosphère confinée et humide, surdensité, bandes multiples, mauvaises conditions climatiques…), de stress (transport, vaccination, gavage,…).

Les manifestations cliniques de la maladie


Symptômes
Riemerellose : canard mulard ne se déplaçant plus, avec les pattes en arrière - photo : ENVT
Canard mulard avec la tête renversée (ENVT)
Riemerellose : canard mulard avec la tête renversée - photo : ENVT
Canard mulard ne se déplaçant plus, avec les pattes en arrière (ENVT)

Les principaux symptômes sont les suivants : animaux ne se déplaçant plus, rampant avec les pattes en arrière, tremblements de la tête renversée vers l’arrière, difficultés respiratoires avec inspiration marquée, diarrhée blanchâtre, arthrite. On peut aussi observer des boiteries, du jetage nasal et oculaire, une toux grasse, un retard de croissance avec hétérogénéité du lot, défaut d’emplumement. Les animaux malades dépérissent et finissent par mourir en quelques jours. La mort peut aussi survenir brutalement avant l’apparition des symptômes. Un lot atteint présente généralement une morbidité importante et une mortalité qui varie de 5 à 75%.

Lésions
Lésions de riemerellose : péricardite et périhépatite - Photo : ENVT
Lésions de riemerellose : péricardite et périhépatite (ENVT)
Lésions de riemerellose : rate légèrement hypertrophiée, marbrée et décolorée - photo : ENVT
Lésions de riemerellose : rate légèrement hypertrophiée, marbrée et décolorée (ENVT)

Les lésions signent une septicémie aiguë ou chronique et sont principalement de la néphrite et une péricardite, pouvant être associée à une périhépatite et une aérosacculite. Une salpingite avec présence d’exsudats caséeux et une méningite peuvent être parfois présentes.

On peut visualiser des hématomes cérébraux légers. L’aérosacculite évolue vers une organisation fibrino-caséeuse. Le péricarde est opalescent en début d’évolution puis cela devient une péricardite sèche d’allure caséeuse. La rate est légèrement hypertrophiée, de taille allongée, avec de possibles marbrures, et souvent décolorée. Au stade terminal, tous les organes sont pris en masse par la fibrine.

Lors d’infections chroniques, des lésions localisées cutanées et articulaires peuvent apparaître, par exemple une dermatite nécrosante au niveau du cloaque.

Le diagnostic


Diagnostic clinique et lésionel

Permet d’établir une suspicion, mais le diagnostic de certitude nécessite le recours à la bactériologie. Il est alors préférable de réaliser les prélèvements sur des animaux vivants.

Diagnostic de laboratoire

L’isolement du germe sur milieux spécialisés (gélose au sang) est assez délicat. Les échecs de culture ne sont pas rares et la pousse lente entraîne une identification nécessitant 2 jours.

Diagnostic différentiel

Colibacillose, pasteurellose, aspergillose

La prévention et le contrôle de la maladie


Traitement

Implique une antibiothérapie (amoxicilline, doxycycline, fluméquine, enrofloxacine, acide oxolinique, novobiocine et lincomycine), toujours associée à un antibiogramme. R. anapestifer est par contre toujours résistant à la colistine. Sa résistance au triméthoprime, à l’oxacilline, à la polymyxine B et à la gentamicine augmente. Si l’évolution est rapide, il faut entamer le traitement par voie injectable, suivi d’un traitement dans l’eau ou l’aliment pendant 5 jours. Le traitement par voie orale peut s’avérer un échec en raison de l’absence d’appétit des malades et de leurs problèmes locomoteurs.

Un traitement adjuvant avec des vitamines et des oligo-éléments peut être envisagé en parallèle. Il faut réaliser un tri quotidien des malades, avec mise en infirmerie et traitement individuel.

Il faut mettre à disposition un nombre suffisant de mangeoires et abreuvoirs.

Prévention

Le recours aux autovaccins permet globalement de contrôler la maladie, avec la difficulté liée à la multitude de sérovars, voire à la variabilité antigénique entre les isolats d’un même sérovar. Des cas de riemerelloses apparaissent cependant dans des contextes de vaccination. Dans un contexte avec une forte pression de la maladie, il faut réaliser une vaccination précoce vers 15 jours. Les injections se font toutes les 4 semaines. Il n’existe pas de vaccin commercialisé.

La prévention prend aussi en compte les éléments d’hygiène (conditions d’élevage, manipulations, état de la litière, des caillebotis,…) et de désinfection. Pour les oiseaux élevés en claustration, la ventilation est un paramètre majeur à maîtriser.

En pratique : causes de la réémergence actuelle de l’infection chez le canard mulard


  • Évolution des souches vers une virulence plus élevée?
  • Facteurs immunodépresseurs qui fragilisent les animaux ? ⇒ hypothèse circovirus, herpesvirus
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