La maladie de Newcastle est une infection virale pouvant affecter plusieurs espèces d’oiseaux domestiques et sauvages, avec des expressions cliniques variées. Les épidémies sont dues à une souche virulente, mais d’autres souches sont endémiques dans de nombreux pays. La maladie peut avoir un caractère zoonotique, avec un syndrome grippal et une conjonctivite, mais cela reste rare. En France la maladie de Newcastle est un danger sanitaire de première catégorie.
L’agent de la maladie et son pouvoir pathogène
La maladie de Newcastle est causée par un paramyxovirus de sérogroupe 1 (PMV1), virus enveloppé à ARN.
Plusieurs souches sont connues, de pathogénicité variable, déterminées par injection intracérébrale sur poussins de 1 jour ou par diagnostic moléculaire. Elles sont classifiées comme :
- Entérogénique asymptomatique = tropisme gastro-intestinal avec l’absence de signes cliniques. Ces souches permettent la confection de vaccins.
- Lentogénique = peu pathogène (ex : HB1, F, LaSota)
- Mésogéniques
- Vélogéniques = très pathogène (ex : Milano, Herts, GB)
Le virus cause l’agglutination des érythrocytes de nombreuses espèces, d’où l’utilité des tests d’agglutination et d’inhibition de l’hémagglutination pour le diagnostic.
Le virus est résistant en milieu extérieur, et persiste pendant de longues périodes à température ambiante, principalement dans les fèces.
Les données épidémiologiques
La plupart des espèces aviaires peuvent être infectées, mais la forme clinique s’exprime surtout chez le poulet, et dans une moindre mesure la dinde. Tous les âges peuvent être touchés mais la sensibilité est accrue chez les jeunes. Le PMV1 cause aussi beaucoup de dommages chez les pigeons (souche spécifique). Les psittacidés sont souvent porteurs asymptomatiques. Les humains en contact pour la première fois avec le virus peuvent développer une conjonctivite et un syndrome grippal. Ils peuvent en tout cas, comme le chat et la souris multiplier le virus.
La maladie a une distribution mondiale, mais pose surtout problème en Afrique, en Asie et au Moyen-Orient. La souche vélogénique, responsable d’épizooties, est maintenant rare, mais a déjà provoqué au moins quatre pandémies. Les souches lento- et mésogéniques sont endémiques dans de nombreux pays. Plusieurs pays européens sont indemnes depuis plusieurs années. Fin de 2017 un cas à touché un élevage de 9000 pigeons à Orchies dans le Nord. Aujourd’hui, et jusqu’au prochain avis de l’OIE, ce département a perdu le statut indemne de Newcastle mais reste conservé pour le reste de la France.
La transmission se fait par des aérosols et des fèces d’oiseaux infectés (notamment les Cormorans et les colombidés). L’excrétion peut durer longtemps (1 an chez les psittacidés, 2 mois chez gallus). La contamination se fait par inhalation d’aérosols infectés ou par ingestion de fèces contaminées. La transmission verticale indirecte est possible, par exposition à l’environnement contaminé ou par les fèces présentes sur la coquille. En ce qui concerne la transmission verticale vraie, celle-ci est potentiellement existante, mais les œufs contaminés éclosent rarement ; cependant, s’ils se brisent accidentellement au couvoir, ils peuvent contaminer toute la couvée, et les oisillons exposés peuvent devenir porteurs sains. Le virus peut aussi être vectorisé de manière passive par du matériel mal désinfecté.
Le virus, selon la souche, est plus ou moins sensible aux désinfectants. Il est cependant sensible aux chaleurs pratiquées pour détruire les salmonelles dans les ovo-produits.
Les vaccins vivants constituent un réservoir et les oiseaux vaccinés excrètent le virus. Cependant, aucune donnée ne montre que les souches vaccinales peuvent devenir plus virulentes.
Malgré l’isolement possible du virus chez les oiseaux sauvages, leur rôle dans la transmission de l’infection ne semble pas significatif.
Les manifestations cliniques de la maladie
Les principales manifestations cliniques se rencontrent chez Gallus (le poulet). Après une incubation de 6-7 jours, voire 3 à 4 semaines pour de rares cas, on a différentes formes cliniques selon l’âge de l’animal infecté et la souche virale. Il n’existe aucun signe clinique, ni signes nécropsiques, pathognomonique pour cette maladie.
Symptômes chez des sujets adultes
- Souche lentogénique : Souvent aucun signe clinique. On peut observer de faibles signes respiratoires et une chute de ponte, avec des œufs à coquille mince, rugueuse ou déformée, et albumen aqueux.
- Souche mésogénique : Forme aiguë discrète, avec une légère dépression et de l’anorexie. Les oiseaux peuvent présenter des signes respiratoires faibles, quelques signes nerveux. La mortalité reste basse ou nulle. Chez les pondeuses, la ponte s’arrête presque totalement, avec quelques œufs de mauvaise qualité ; la production reprend ou pas, selon le stade de ponte. Si les pondeuses sont bien vaccinées ces signes seront d’autant plus diminués.
- Souche vélogénique : Les signes varient selon le tropisme du virus, mais la morbidité et la mortalité sont élevées, presque de 100%. On distingue des formes pneumotropes, viscérotropes et neurotropes de la maladie. On peut avoir une dyspnée, souvent marquée. Plusieurs oiseaux vont présenter une diarrhée violente verte, avec de la conjonctivite et une paralysie, et une mort en 2-3 jours. Il peut y avoir cyanose et œdème des tissus périorbitaux, avec un exsudat oculaire et nasal visqueux. Certains oiseaux vont montrer des signes nerveux :excitabilité, hypermétrie 3 à 4 jours après l’infection puis des tremblements, des tournis, des parésies, de la paralysie au bout de 5 jours et se terminant par des convulsions.
Symptômes chez des jeunes oiseaux
- Souche lentogénique : Apparition soudaine de signes respiratoires (toux, éternuements, râles, décharge nasale et oculaire). Certains oiseaux auront la tête enflée. Même les souches très atténuées, comme B-1, peuvent entraîner ces signes chez les oiseaux immunodéficients.
- Souche mésogénique : On a une dépression brutale avec de la prostration. Les signes respiratoires sont marqués. Les signes nerveux (torticolis) peuvent suivre ou accompagner les signes respiratoires. Habituellement, un faible nombre montre des signes nerveux (0-25% du lot). Eventuellement, on voit de la paralysie et de la mortalité (jusqu’à 50%).
- Souche vélogénique : Mêmes signes qu’avec la souche mésogénique, mais avec une mortalité plus élevée et une évolution plus rapide.
Chez les autres volailles les signes varient selon l’espèce. Les symptômes respiratoires sont plus marqués chez la dinde. La pintade présente surtout des signes nerveux. Faisans et perdrix ont des paralysies semblables à ce que l’on voit chez les Gallus.
Lésions
- Les souches lento- et mésogéniques provoquent peu de lésions. Il peut y avoir une légère aérosacculite, de la conjonctivite et une trachéite.
- La souche vélogénique provoque de nombreuses lésions, mais qui peuvent varier selon les individus. On a une congestion généralisée de la carcasse et (ou) une splénomégalie congestive et (ou) une hypertrophie du thymus. Les lésions respiratoires sont localisées à la trachée et aux sacs aériens, avec une inflammation sévère ; on peut observer de l’œdème facial. Les lésions respiratoires sont rares sauf en cas de surinfection. Les muqueuses du proventricule et du gésier, ainsi que la muqueuse et la séreuse de l’œsophage, sont souvent hémorragiques (pétéchies ou plaques hémorragiques). Dans le reste du digestif, on a de l’entérite nécrotique ou des hémorragies multifocales, impliquant souvent le tissu lymphoïde dans la muqueuse, notamment au niveau des amygdales caecales. Les ovaires montrent de l’œdème, des hémorragies et de la dégénérescence. Chez les oiseaux en couvaison on peut voir apparaitre des péritonites liés à un épanchement du vitellus de l’œuf.
Les oiseaux d’ornements ne montrent souvent aucune lésion ou seulement des discrètes.
Chez la dinde, les lésions sont semblables à celles chez le poulet, mais en moins sévère.
Le diagnostic
Diagnostic épidémio-clinique
En dehors des formes aiguës, le diagnostic épidémio-clinique est difficile. Il faut s’appuyer sur un diagnostic de laboratoire.
La mise en évidence de l’agent viral implique l’isolement du virus sur œufs embryonnés, à partir d’écouvillons trachéaux, oropharyngés ou cloacaux, puis recherche de l’activité hémagglutinante. Cet isolement est difficile à réaliser à partir d’oiseaux ne présentant que des signes nerveux. Ensuite, il faut réaliser l’évaluation du pouvoir pathogène, par diagnostic moléculaire ou par injection sur poussin de 1 jour. On déduit l’indice de pathogénicité intracérébrale (ICPI) :
- ICPI souche lentogène : 0-0.4
- ICPI souche mésogène : 1.2-1.6
- ICPI souche vélogène : 1.75-2
Cette méthode commence à être remplacé par des méthodes de RT-PCR qui sont plus sensibles et permettent de quantifier et d’identifier les souches. La méthode ICPI permet de définir les souches de Newcastle qui seront réglementées (ICPI>0.7) par l’OIE. Elles sont complétées par les méthode de RT-PCR pour identifier la souche.
Les prélèvements à réaliser sont des écouvillons trachéaux et cloacaux, ou des prélèvements de fèces d’oiseaux vivants, ou des organes et fèces d’oiseaux morts.
La sérologie est possible par inhibition de l’hémagglutination, par hémagglutination passive, par ELISA. L’interprétation des résultats peut être délicate selon les antécédents vaccinaux ou pathologiques.
Diagnostic différentiel
Penser en priorité à l’influenza aviaire hautement pathogène (danger sanitaire de première catégorie), sinon les signes cliniques peuvent être confondus avec ceux de l’aspergillose, mycoplasmose, LTI, pasteurellose.
La prévention et le contrôle de la maladie
Prévention sanitaire
Vu la facilité de dispersion du virus, les mesures de prévention sont essentielles. Des mesures de contrôle des animaux importés, des reproducteurs et des mesures classiques d’hygiène et de nettoyage et désinfection sont indispensables. Selon les souches, les doses de désinfectants peuvent varier. En cas de foyer infectieux, il faut abattre les oiseaux, désinfecter les bâtiments et matériels, détruire la litière, bloquer la zone contaminée et restreindre les mouvements d’animaux proche de foyer. De bonnes mesures de biosécurités et de quarantaines restent les meilleures mesures pour prévenir l’infection par le virus de Newcastle. De plus, on réalise des vaccinations en anneau autour du foyer. La zone est déclarée libérée de Newcastle 6 mois après le dernier cas clinique et 3 semaines après l’abattage.
C’est une maladie classée dans les dangers sanitaires de première catégorie. L’OIE mène des polices sanitaires à l’échelle mondiale en vue de réguler cette maladie.
Vaccination
Il n’existe pas de traitement médical mais beaucoup de vaccins sont disponibles. En France, la vaccination est permise : elle est recommandée pour les oiseaux à durée de vie longue et est obligatoire chez le pigeon et les oiseaux participant à des manifestations publiques.
On dispose de vaccins vivants à souche lento- ou mésogène (La Sota, HB1, Clone 30, VG/GA) et de vaccins inactivés.
Le vaccin vivant est capable de se multiplier dans l’organisme et confère une protection de courte durée (2 à 6 semaines) ; les objectifs de ce vaccin sont de stimuler les organes locaux de l’immunité cellulaire et de créer ainsi une barrière à la pénétration du virus sauvage, et d’entraîner la production d’anticorps circulant qui neutralisent le virus.
Le vaccin inactivé entraîne la production d’anticorps de façon importante et durable (1 an de protection).
La vaccination avec le vaccin inactivé se fait par injection. La vaccination par vaccin vivant est recommandée par voie aérienne ; pour la primo-vaccination, des gouttelettes de 150-250 mm sont recommandées, nébulisées à 30 cm des oiseaux ; lors des vaccinations de rappel, des gouttelettes plus fines sont utilisées, de 50-150 mm.
Vaccins disponibles :
- Vivants : Avinew® (Mérial), Nobilis®Ma5+Clone30 (Intervet), Nobilis®ND Clone30 (Intervet), Nobilis®Hitchner (Intervet), Nobilis®ND LaSota (Intervet), Pestos® (Mérial), Poulvac® HitchnerB1 (Fort Dodge), Poulvac® LaSota (Fort Dodge), Sotasec® (Mérial)
- Inactivés : Binewvaxidrop® (Mérial), Imopest® (Mérial), Nobilis®IBmulti+ND (Intervet), Nobilis®IBmulti+ND+EDS (Intervet), Nobilis®newcavac (Intervet), Nobilis®RT+IBmulti+G+ND (Intervet), Nobilis®TRT+ND (Intervet), Ovo4® (Mérial), Poulvac®BI3 ND (Fort Dodge), Tur3® (Mérial)